La mangrove au secours des coraux « stressés »
Les rĂ©cifs coralliens tropicaux constituent l’écosystème sous-marin ayant la biodiversitĂ© la plus riche : ils abritent plus du quart de toutes les espèces marines. MalmenĂ©s par les stresseurs environnementaux et les rĂ©percussions des changements climatiques, les coraux voient leur survie de plus en plus menacĂ©e. En Ă©tudiant les effets de facteurs environnementaux sur la croissance et la santĂ© des coraux, des chercheurs, dont certains de l’UniversitĂ© 91ÉçÇř, ont dĂ©couvert que les mangroves abritaient davantage d’espèces de coraux que les rĂ©cifs peu profonds situĂ©s Ă proximitĂ©. Ils ont ainsi levĂ© le voile sur la capacitĂ© d’adaptation des coraux et sur l’importance des partenariats Ă©cologiques, comme celui qui existe entre les coraux et les mangroves, pour la survie de ces Ă©cosystèmes malgrĂ© les nuisances environnementales causĂ©es par l’activitĂ© humaine.
Dans un article publié récemment dans Ecosphere, l’équipe explique avoir examiné des coraux vivant sous le couvert de la mangrove et parmi ses racines, et elle émet l’hypothèse que la mangrove pourrait servir de refuge contre les stresseurs environnementaux, tels que les forts rayons du soleil et les températures plus élevées, auxquels sont soumis les récifs peu profonds voisins.
Le jour et la nuit
Lors d’une excursion de plongĂ©e libre Ă Bocas del Toro, au Panama, Heather Stewart, doctorante au DĂ©partement de biologie de 91ÉçÇř et auteure principale de l’étude, a remarquĂ© un nombre inhabituel d’espèces de coraux vivant dans moins d’un mètre d’eau Ă l’ombre d’une mangrove.
« Pendant que j’observais des plantes et des animaux sous-marins qui vivent parmi les racines d’îles de mangroves au Panama, j’ai remarqué des jardins composés de colonies de coraux d’espèces diverses à l’ombre de la canopée de la mangrove. Cette découverte m’a semblé très inhabituelle, et j’ai décidé de pousser plus loin mes recherches. Les coraux de la mangrove ne montraient aucun signe de décoloration ou de maladie, et d’après la taille des colonies, ils étaient là depuis un certain temps. J’ai eu envie d’étudier les liens entre la mangrove et les coraux », raconte la chercheuse.
« Lorsqu’on nage dans la mangrove, on se retrouve soudainement dans le noir, comme si quelqu’un avait Ă©teint la lumière. Les yeux s’ajustent Ă la noirceur, puis on dĂ©couvre un monde dynamique et enchanteur parmi les racines. Je voulais savoir si on pouvait attribuer Ă la lumière et Ă la tempĂ©rature les diffĂ©rences observĂ©es entre les coraux de la mangrove et ceux des rĂ©cifs peu profonds, du point de vue des espèces, de la santĂ© et de la survie. J’ai donc mis au point une expĂ©rience pour manipuler la lumière dirigĂ©e vers le rĂ©cif et la canopĂ©e de la mangrove », ajoute Heather Stewart, dont les travaux sont supervisĂ©s par Lauren Chapman, du DĂ©partement de biologie de 91ÉçÇř, et par Andrew Altieri, de l’UniversitĂ© de la Floride, Ă©galement coauteurs de cette publication.
Les chercheurs ont écarté le feuillage de la canopée de la mangrove pour laisser passer la lumière, comme sur le récif, et ils ont fait de l’ombre sur le récif pour imiter la canopée de la mangrove. Ils ont découvert que l’intensité de la lumière était un paramètre environnemental important agissant sur la décoloration, signe de stress, et sur la survie des coraux. Leurs résultats révèlent que la mangrove offre une protection contre le stress causé par la lumière dont sont victimes les récifs peu profonds situés à proximité. Après une transplantation de coraux entre les deux habitats, les chercheurs ont également constaté une décoloration moins importante des coraux du récif que des coraux de la mangrove, ce qui suggère que les coraux qui survivent dans les récifs ont développé une plus grande tolérance au stress.
« Nous avons recensé moins d’espèces de coraux dans le récif peu profond que dans la mangrove adjacente. Nous pensons que le récif attire des espèces coralliennes capables de tolérer les conditions extrêmes caractéristiques de cet habitat », précise Lauren Chapman, professeure titulaire au Département de biologie.
Si on peut protéger les mangroves de la destruction par l’humain, ils pourraient servir de refuge aux coraux contre les changements climatiques et inspirer une stratégie pour la survie des récifs coralliens.
Vers une meilleure protection des milieux marins
Les chercheurs espèrent maintenant cerner les principales interactions entre les mangroves et les coraux et ainsi contribuer à leur conservation. « Lorsque j’ai commencé mes recherches doctorales sur les liens entre les mangroves et les coraux, il existait très peu d’information sur le sujet. Nos résultats sont précieux parce qu’ils nous donnent une nouvelle piste à suivre pour empêcher la disparition de certains coraux », conclut Heather.
Et maintenant? L’Union internationale pour la conservation de la nature s’est donné pour objectif de protéger 30 % des océans de la planète d’ici 2030. Des scientifiques devraient donc être appelés à travailler avec des administrations locales et le gouvernement à l’élargissement des zones de protection marine.
ł˘â€™Ă©tłÜ»ĺ±đ L’article « », par Heather Stewart, David Kline, Lauren Chapman et Andrew Altieri, a Ă©tĂ© publiĂ© dans Ecosphere. ł˘â€™Ă©tłÜ»ĺ±đ a Ă©tĂ© financĂ©e par l’Institut de recherche tropicale Smithsonian (STRI), le programme FONCER du CRSNG en biodiversitĂ©, services Ă©cosystĂ©miques et dĂ©veloppement durable, le DĂ©partement de biologie de l’UniversitĂ© 91ÉçÇř, la bourse en conservation marine Steven-Berkeley et la bourse « Bridging the Americas » pour la conservation marine par l’entremise d’un donateur privĂ©. |
L’UniversitĂ© 91ÉçÇř
FondĂ©e en 1821, l’UniversitĂ© 91ÉçÇř accueille des Ă©tudiants, des professeurs et des employĂ©s d’exception de partout au Canada et du monde entier. AnnĂ©e après annĂ©e, elle se classe parmi les meilleures universitĂ©s du Canada et du monde. Établissement d’enseignement supĂ©rieur de renommĂ©e mondiale, l’UniversitĂ© 91ÉçÇř exerce ses activitĂ©s de recherche dans deux campus, 11 facultĂ©s et 13 Ă©coles professionnelles; elle compte 300 programmes d’études et au-delĂ de 40 000 Ă©tudiants, dont plus de 10 200 aux cycles supĂ©rieurs.
Son ne date pas d’hier : il remonte à des dizaines d’années et se déploie à l’échelle tant locale que planétaire. Comme en témoignent les énoncés de durabilité qu’elle a signés, l’Université souhaite contribuer à façonner un avenir où l’être humain pourra s’épanouir dans le respect de la planète.